Au processus d'évaluation est nécessairement associé une notion des progrès ou de constat des réalisations effectuées. Ces actions peuvent être reconduites d'années après années mais on comprend qu'on atteint facilement des limites à la performance souhaitée dès lors que l'on atteint la maitrise du champ d'intervention professionnel.
Continuer à évaluer revient finalement à contrôler l’incontrôlable, le savoir faire, l'expertise, les attitudes et obligatoirement à pointer une place dans un ordre subjectif non plus sur du vérifiable mais sur une quantification des impressions. Le management "moderne" s'institue comme arbitre des élégances en prétendant mettre les salariés sur la voie du "perfectionnement des pratiques" sans cesse requis.
L'idée fondatrice c'est que tout peut être évalué et pour continuer à exercer ce contrôle, les organisations à travers le discours de la polyvalence et du changement permanent de fonction , de service , d'outil de travail , peuvent continuer à générer des managers contrôleurs dont la tâche est à peine plus complexe que les chronométreurs du taylorisme.
On a tous en mémoire ces jeunes fraichement émoulus des écoles de gestion qui, à grand renfort de scientificité, vont prétendre rationaliser l'activité d'opérateurs dont il ne comprennent pas le travail.
Ceux d'entre eux qui comprennent cette situation se bornent à simuler ces évaluations . Ceux qui ont peur de leur propre hiérarchie ou qui en sont les dévots , s’ingénient à faire consciencieusement leur travail absurde d'évaluation et par là même se décridibilisent comme leader fonctionnel potentiel.
Ces évaluations sont très rarement positives surtout si l'on attend que le salarié fasse un examen de conscience ou il est censé dire la vérité sur ses difficultés ses manques et ses carences devant ce qui ressemble à un commissaire politique.On est confondu par tant de naïveté. ces "confessions " n'ont en fait d'autre fonction que de tenter de maintenir la pression et donner du grain à moudre pour un rapport d'évaluation ou l'on pourrait de ce fait pointer les points à améliorer et à vérifier l'année suivante . En réalité c'est faire en sorte que perdure une mise en scène du contrôle permanent en laissant subsister la menace de réprimandes et de sanctions éventuelles. Le fait de rendre le salarié acteur de ses propres turpitudes relève évidement d'une grande perversité et ne peut qu'engendrer chez lui de la méfiance et la production d'un discours calibré et politiquement correct
Ces procédures vont à l'encontre d'une satisfaction au travail mais reprennent les modèles de la perfectibilité et de la performance initiés dans un passé d'idéal d'enfant sage et obéissant, d'élève brillant et compétiteur pour enfin aboutir au prototype du salarié se dépassant sans cesse, tenace, dévoué à son organisation et obéissant à ses managers . Dans une sorte d'oubli de l'individu , de sa spécificité, de ses demandes, de ses désirs et de ses stratégies, on assiste bel et bien à une tentative de réification qui au fond transformera le vivant en outil de production
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