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19 juin 2011

Souffrance au travail. Pour bien travailler... désobéissez !

         Pour bien faire son travail  il faut se mettre en infraction par rapport aux structures hiérarchiques plus souvent gestionnaires des résultats que détentrices d'une expertise qui faciliterait le travail. Dans le meilleur des cas et même lorsque le travail sera effectué malgré la pesanteur réglementaire, les opérateurs seront toujours à la merci d'une critique concernant le non respect des procédures . En réalité  on aura toujours intérêt à entendre  que les raccourcis reprochés privent les managers d' une partie de leur pouvoir et les renvoient à leur inutilité technique. Au fond il existe chez ce type de manager une suspicion primaire qui engendre la peur que les "collaborateurs" les mettent en difficulté et du coup les signalent comme étant incapable de gérer les équipes de travail.
        C'est presque un lieu commun de constater que  sous ce régime gestionnaire et frileux, le travail ne peut être effectué que si les salariés font du zèle à l'image des douaniers qui au lieu d'exercer leur expertise  en fluidifiant le trafic aux frontières, faisait exactement leur travail selon les procédures de contrôle en vigueur et paralysaient ainsi les accès routiers . En faisant strictement leur travail ils parvenaient à le rendre absurde.
On comprend bien que si on est obligé d'entrer dans une sorte de clandestinité pour faire son travail il ne peut en aucun cas être observé et le vrai travail est invisible.
        C. Dejours (1) montre que toutes les pratiques d'évaluation de travail que ce soit par la performance ( le nombre est inversement proportionnel à la qualité) par le temps de travail (on ne cesse pas de penser à son travail lorsqu'on le quitte) par les compétences qui dérivent vers l'évaluation de la personne : "on ne peut pas définir caractériser ni évaluer une compétence sans en passer par une description fine du travail dans lequel elle s'actualise"  sont critiquables. Si l'on rajoute que le travail est en grande partie invisible alors "on ne sait pas évaluer l'effort ni le travail qui implique une relation de service reposant pourtant sur la mobilisation subjective et sur la coopération intersubjective entre le producteur du service et son client ou son usager"
        Les gestionnaires ont évacué l'accès au réel du travail en se débarrassant des feed back , des analyses critiques,des retours d'expérience et en faisant passer les impératifs comptables pour du travail. Quel qu’en soit la forme, l'évaluation du travail est présentée comme un outil de management et l'entretien annuel d'évaluation comme une de ses étapes essentielles.
        Non contente de se situer dans l'informel de l'activité , ou peut être à cause de cela, l'évaluation se présente en fait comme une procédure arbitraire, irrationnelle injuste et bien souvent injustifiable qui prétend relever de l'objectivité

(1) Christophe Dejours "l'évaluation du travail à l'épreuve du réel, Critiques des fondements de l'évaluation" INRA éditions

Voir une vidéo de Marie France Pezé


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