La question de l'évaluation des performance ou de "l’Entretien Annuel d' Evaluation des Activités" (EAEA), qui en est un autre "habillage" est loin d'être réglée par les procédures qui se veulent scientifiques ( on mesure des écarts entre des objectifs et des résultats) ou psychosociales ( on échange à propos des causes explicatives finalement subjectives et toujours question de point de vue, de la faillite des résultats ). L'évaluation est souhaité par les salariés et pour une grande part d'entre eux en échange d'une contribution apportée à l'organisation par le travail fourni, le salarié souhaite une rétribution
Il faut s'entendre sur le sens de cette rétribution.
Depuis les enquêtes d'Herzberg et son repérage des facteurs d'absence de satisfaction (confort de travail,salaire, statut, relations interpersonnelles) et d'absence d'insatisfaction au travail ( évolution de carrière, responsabilité, autonomie...) on sait que le salaire, les primes, etc ne sont pas ce qui compte le plus. Dans la rétribution la dimension matérielle est secondaire en revanche ce qui importe le plus au salarié c'est sa dimension symbolique que C. Dejours identifie comme celle qui nous fait travailler et qui se traduit par la reconnaissance. Reconnaissance comme gratitude et reconnaissance sous forme de témoignage de la contribution.
Cette reconnaissance porte avant tout sur le travail ( on reconnait le travail effectué) mais l'individu peut éventuellement s'en emparer pour son usage personnel, pour son ego. La reconnaissance vient alors nourrir l'identité de la personne et constituer un bénéfice narcissique. En revanche, l'absence de reconnaissance est un élément souvent déclencheur de manifestations psychopathologiques par le mécanisme bien connu de décompensation psychologique
La reconnaissance n'est pas un processus objectif mais elle témoigne de la valeur du travail effectué selon les règles de l'art. Bien entendu cette évaluation du travail ne peut être portée que par ceux qui le connaissent et vis a vis desquels l'individu concerné à confiance.
On le voit bien , l'évaluation du travail qui peut déboucher sur de la reconnaissance est une opinion , un jugement et aujourd’hui il y a peu d'espoir de construire une évaluation par des pairs qui aboutirait à ce résultat
Les organisations actuelles, par leur structuration , leurs méthodes de gestion et l’extrême volatilité des métiers sont en effet loin de favoriser la solidarité et la confiance et donc ce type d'évaluation.
Même si dans les EAEA les commentaires les remarques voire les désaccords sont consignés, les mesures , les chiffres , le classement ont encore un grand avenir. A cet égard il serait simple et intéressant de calculer l’écart type des évaluations dans une organisation quelconque pour constater qu'il est faible et que donc les mesures se dispersent autour de la moyenne qu'il s'agisse de chiffres ou de lettres.
Dès lors on arrive assez rapidement à une impasse dans les évaluation et en conséquence dans la gestion des ressources humaines.Gérer les évaluations devient une véritable stratégie. Qu fait-on des salariés qui atteignent le maximum possible ? Est ce que le manager n'est pas tenté de ralentir cette progression par une minimisation des notations de façon à laisser un marge de manœuvre pour continuer à maintenir la pression ? Il restera toujours l'acquisition de compétences nouvelles par l'élargissement des tâches présentées comme un enrichissement.
A cet égard C Dejours indique" ..contrairement aux présupposés de l'évaluation des compétences, la performance précède la compétence. C'est face à l'inédit , à la résistance du réel, à l'échec puis grâce à l'obstination et à la mobilisation subjective que l'on parvient à transformer son impuissance en performance" Ce n'est qu'après avoir fait un retour sur ces expériences et les avoir surmontées et formalisées que l'on peut parler de compétence.
Il n'en reste pas moins vrai que lorsqu'on croise les référentiels métiers avec les activités des salariés l'organisation à tout intérêt à maintenir des marges de manœuvre pour maîtriser l'évolution des salaires .
On va donc proposer des dispositifs perfectionnements d'adaptation au poste qui vont permettre de temporiser jusqu’à l'année suivante pour être évalués. Pour peu que les budgets formation soient réduits on voit bien que la temporisation peut être allongée et que l'évaluation ne va plus porter que sur des détails. En toile de fond il existe aussi les promotions et changements significatifs d'activité mais les places sont chères !
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